Que monte le chant argenté des lames...

Les Carpates. Cœur de la Transylvanie, où tout a débuté, où tout finira, si Dieu le veut. Dieu ce vieux con qui nous a tous laissés tomber il y a bien longtemps. En tout cas, moi, il ne m’a jamais particulièrement eu à la bonne. Un jour, j’irais lui péter sa sale gueule, mais chaque chose en son temps.
Les circonvolutions terreuses s’enchainaient au gré du chemin. Et je touchais au but. Bon sang, enfin, après huit cent ans d’errance, je touchais au but ! Car c’était vraiment là que tout avait pris source. Les vampires, les lycans, les races occultes qui effraient les enfants avant d’aller au lit.
Qui penserait que tout cela était vrai ? C’était hors de propos. Pourtant, oui, j’y étais.
Le fameux Plateau d’Argent, d’où suintait une magie suffisamment puissante pour que personne ne s’en approche. Bien sûr, pour le sol qui se mettait à briller à la nuit tombée, il devait y avoir une explication rationnelle, je n’en doutais pas (bien que je n’aie nullement envie de chercher laquelle : je m’en contrefichais), mais il y avait quelque chose de plus, de plus puissant et profond. Car un simple plateau qui brillait à la tombée du jour, ça n’avait rien de tant effrayant.
La route de terre montait vers une crête tandis que le soleil plongeait vers l’horizon. J’atteignis le sommet en même temps que le soleil, chacun dans un sens contraire. Je pus voir avec amusement l’ombre qui s’étendait sur le monde alors que l’astre du jour lançait ses derniers rayons. J’avais marché pendant longtemps pour arriver là. Mais le timing était parfait. Comme si elle suivrait l’ombre, la lueur argentée se répandit sur le plateau où je venais d’accéder.
Il y régnait cette atmosphère mystique qui accompagnait les lieux où la magie n’était pas que légende. Un frisson me parcourut l’échine. Le sang avait déjà coulé par ici. C’était un grand plateau sans rien de particulier, hormis la lueur argentée et sa magie. J’avançai tranquillement jusqu’au centre. J’étais bien décidé à passer la nuit ici, et nous verrions bien ce qui allait se passer.

Un bruissement rapide et violent dans les airs. Je m'étais déjà envolée haut dans le ciel noir au reflet argenté. Une nuit parfaite pour effrayer les gens? Oui, certainement. Cependant, sous ma forme grise bleutée de harpie, je ne m'imaginais que trop bien arrachant la gueule puissante et gigantesque d'un lycan... Une gerbe sanglante viendrait m'éclabousser le visage et là, à cet instant précis, je serais parfaitement heureuse. Toutefois, l'envie de me battre n'était pas au beau fixe. Seule l'envie de faire mal m’envahissait. Trop de complications pour une soirée absolument ordinaire. Dans les environs, je n'avais entendu parler d'aucun nouveau chasseur, ce qui me laissait tout le temps de tester nouvelles acrobaties et imbécilités en tous genres.
Finalement, je me fis glisser sur différents courants d'airs et en une fraction de seconde, me retrouvais dans un arbre grand et ancien, situé aux abords du plateau d'argent. Assise, sagement, les jambes pendantes vers le sol, mais assez haute pour rester à l'abri de prédateurs terriens. Je n'avais fait bouger que quelques branchages, et n'était plus, à présent, qu'une gamine à peine sortie de l'adolescence, à robe blanche faites de voiles légers. Je ne craignais, et ne craint toujours pas le froid. D'ailleurs, d'après ce que je constate de jour en jour, je suis toujours aussi froide qu'un cadavre. Traitrise de mon corps, qui joue des tours à quiconque croirait en me voyant, à une gente demoiselle, fraiche comme la rosé.

J'observais le pâle couché de soleil, s'effacer dans la sombre obscurité d'une nuit de Transylvanie. Puis, mon attention vint se porter sur plus vivant que moi. Ou... Pas? De toute manière, la question n'était pas franchement là. Un sourire à l'allure carnaçié vint se dessiner doucement sur ma bouche charnue. Une victime? Je ne préférais pas me précipiter la tête baissé. Car, d'après sa carrure et son aspect relativement sûre, il ne devait pas être un homme sans défense, bien loin de moi cette idée stupide. Je me baissais légèrement, le visage s'illuminant que superficiellement de la lueur du lieu. Ainsi, les yeux transparent et effrayant de la belle s'illuminant radieusement. Donnant une apparence humaine? Ou simplement donnant l'illusion qu'une âme logeait dans son petit corps frêle. Ce petit corps frêle et rachitique qui n'est rien d'autre que le miens. Une branche craque. Ce n'est pas grave, si il est aussi futé que je le penserais, il pourra me repérer, dans le cas contraire, ce sera un idiot. Et... Que j'aimerai que ce soit le cas... Car, sans plus attendre, je me précipiterai sur sa chair tendre et chaude.

Une branche craqua, dans un des arbres bordant le plateau. Le son était distinct et portait très bien, dans le silence environnent : impossible de le louper. Un nouveau frisson me parcourut l’échine, et je resserrai un peu le tissu maculé du sang de Mao qui me servait d’écharpe.
Ce n’était sans doute pas un humain qui se baladait ici, surtout à cette heure. Non, ça devait plutôt être un vampire, ou un lycan ? Les lycans étaient ce qu’on pouvait appeler des gros bourrins. Ils avaient la grâce innée des prédateurs quand ils combattaient, mais n’en étaient pas moins des bourrins à la force inimaginable. Surtout venue la pleine lune, comme ce soir. Oui, des lycans seraient intéressants à tuer. Je n’avais pas encore réalisé mon expérience sur les lycans. D’ailleurs, est-ce que leurs transformations étaient douloureuses ? En ce cas, peut-être apprécieraient-ils plus les soins que je leur prodiguerais ? Il n’y avait bien sûr qu’un seul moyen de le savoir.
Il fallait le déquiller de son arbre. Survenait alors une question. Les lycans grimpaient-ils aux arbres ? C’était plutôt un truc de vampire ça. Dommage, j’aurais quand même bien aimé que ce soit un lycan.
Quoi qu’il en soit, je fis mine de n’avoir rien entendu, m’avançant jusqu’au centre du plateau pour y déposer ma besace.
Je m’assis au sol, les sens aux aguets, tout en tirant de mon sac une couverture de laine et un briquet d’amadou. Il me faudrait aller chercher du bois, ravissant prétexte pour aller saluer la créature qui m’observait.

La petite tête sur le côté et les yeux farouchement accrochés au jeune homme. J’avais une impression finalement étrange. Le faisait t'il exprès? Où était-il simplement un voyageur innocent et absolument ignare. Qui, sans voir le danger nul part en ces lieux, venait faire ce que nous pourrions apparenter à une sorte de vagabondage? La question restait dans ma petite tête de piaf, tendis que, sans que véritablement j'en prenne conscience de commençais à pencher dangereusement au dessus du vide. Mais que voulez vous. La présence de cet inconnu était bien plus importante que celle de faire attention à sa propre vie, bien que faire attention à son existence. Pour une immortelle n'était pas franchement la chose la plus importante. Finalement l'envie était trop forte, mais la raison bien trop présente aussi. J'entrepris de descendre. Mais non comme un suceur de sang idiot. Plutôt comme un petit chat guettant sa proie. Une branche en dessous de l'autre. Doucement, dans un silence presque de mort, voilà ce qu'il fallait faire. Ainsi, tel un fin courant d'air, je me glissais entre la végétation. Faisant pattes douces sur ces traitres de bouts de bois.

Le vagabond était proche, de plus en plus proche. Et finalement, voilà, j'étais là. Juste à quelque pas de lui. De là haut, il ne semblait pas si grand. Il faisait peut être même lutin. D'ici, ce n'était plus lui qui devait se sentir ainsi... La douce lueur, mélangeait à la légère brume, me faisait me fondre avec ce que nous appellerions une ambiance glauque. Ou macabre? Ou les deux peut être même... Mais à trop en vouloir, on finit par se faire souvent avoir non? Un moment se déconcentration et le plan parfaitement étudié tombe à l'eau. Un craquement de brindille sous les pieds, le sol, comme l'altitude, semblait m'en vouloir aujourd'hui. Ou simplement étais-je trop inconstante et moins alerte à ce qui m’entourait. Trop attiré par ce nouveau jouet que je n'avais encore jamais vu? Le bruit retentissant dans le petit lieu. Un reflexe certes stupide mais efficace. Je m’étais déjà baissée, me fondant avec la brume. Bien que ce stratagème ne soit pas forcément très durable. Il pourrait toujours laisser un champ de manœuvre pour attaquer relativement large. Non? En tout cas ma petite cervelle aimer à penser que oui.

Je me demandai un instant si mon armement n’était pas trop suspect. Parce que bon, ce n’était pas si j’avais de quoi mener une guerre, mais presque…Quoi qu’en même temps, je m’en fichais. Il n’y avait personne qui soit à ma mesure. Personne que

-Mao…

Le son résonnait doucement, entrainant immanquablement un sourire sur mon visage. Un sourire qui dévoilait mes dents comme le sourire du Destin quand il s’apprête à vous broyer. Je me passai la langue sur les lèvres en serrant doucement la poignée de ma Morgenstern.
Je me levai doucement, dans le bruissement de mes vêtements, quand retentit un nouveau bruit. Décidément, je n’avais pas laissé la créature indifférente. Puisqu’elle s’était approchée. Elle était toujours au même endroit, mais plus proche du sol. Juste hors de mon champ de vision. Plaise au Destin qu’elle n’ait pas bougé…Je plongeai ma main gauche vers une francisque et l’envoyai de toute ma force dans la direction du bruit. Il n’y avait aucune chance que je fasse mouche, bien sûr, à moins de tomber sur le plus idiot des vampires, mais ce serait trop simple, alors.
Je me retournai. Le plateau était vide. Soit ma proie courait vraiment très vite, soit elle s’était dissimulée dans la brume qui se trouvait contre le sol. Je pris une autre francisque, et ma Morgenstern dans la main droite, soudain immobile, à chercher où se trouvait mon ennemi.
Un détail me frappa. Je ne l’avais entendu qu’à deux reprises. Rien à voir avec les balourds dont j’avais l’habitude. Là, s’il le voulait, il pourrait être entre mes jambes…Silencieux, insaisissable tel le vent.
Je passai ma langue sur le tranchant de ma hache, pour l’en imprégner du goût métallique qui venait autant de la lame que du sang qu’elle fit suinter.

-Alors, petit vampire, tu te caches ? Tu as peur ? De moi ? Simple humain ?

Je me redressai bien droit, sachant que je faisais la cible la plus parfaite qui soit. J’eus un petit rire sec. Mes doigts bien serrés sur mes armes.

-Mes armes ne sont même pas BE-NITES ! criai-je en détachant distinctement les syllabes. Viens…

Tendant l'oreille, mais ne bougeant aucunement. J'écoutais, inlassablement. J'avais envie de lui bondir au visage et de lui arracher les yeux pour qu'il ne voit jamais mon visage. Ni même le visage de quiconque en y réfléchissant bien. Seulement, il n'était plus languissant vers l'horizon à prononcer, mon prénom? Mouis. Raison de plus pour les lui arracher. Bien que, ce ne pu qu'être sa bien aimée, qu'il venait de quitter pour une quête absolument débile, symbole il apparaitrait de virilité pour les hommes. Toutefois, je ne voulais pas non plus me faire embrocher ce soir. Certes, je ne souffrirais pas des masses, si justement, ses armes n'étaient pas bénites. Mais tout de même, pourrais-je vraiment le croire? Non. Biensur que non.

J'aime vraiment tuer. Mais les autres, ainsi que la douleur. C'est marrant de faire souffrir les autres, mais quand cela se retourne contre moi même. la chose me parait beaucoup moins séduisante. Bien. J’allais me lancer. Non pas dans ses bras! Ni dans ses armes d'ailleurs. Juste me lancer dans une approche amusante. Enfin pour moi. Mais qui ne lui plaira certainement pas. Avançant finalement, augmentant ma rapidité en me métamorphosant qu'à moitié. Je me fit comme glisser, avec vitesse, toujours proche du sol, dans la brume. Qui, il est vrai pouvait s'agiter à mon passage. Mais il était selon moi impossible de réellement repérer le mouvement. Finalement ses jambes apparurent à ma vision nocturne. Enfin. Comme un serpent entourant sa proie. Juste me hissant doucement le long de son dos, je me mis à lui souffler, très doucement, comme un léger murmure, au creux de l'oreille. C'était une voix crystaline, prête à s'évanouir aux moindres éclats.

-"Je suis là."

J'étais là. Il est vrai. Mais surveillais tout de même les mouvements pour m'écarter en un saut rapide à la moindre once de dangers. La soirée allait était amusante... certainement. Cependant, alors que je ne me situais qu'à quelque centimètre de sa nuque. Une odeur m'envahit les narines. Une odeur que je ne connaissais que vaguement, mais qui pourtant m'était familière. Une moment d'inattention, voilà ce que ceci produisit sur mon être.

Effectivement, elle employa ce stratagème de la brume, et comme je m’y attendais, elle se retrouva derrière moi. Son souffla effleura ma nuque et sa voix murmurée s’immisça dans mes oreilles, révélant son sens cristallin.
Je sentis l’odeur de son haleine, et le timbre de sa voix s’imprima presque physiquement dans mon esprit. Elle était derrière moi, collée à moi, elle pouvait me tuer en une fraction de seconde, et ce serait un temps suffisant pour l’emmener avec moi. Mais sa fragrance si spéciale éveilla le vieux souvenir enfoui en moi qui ne demandait que ça.
Je souris largement, profitant de ce que je devinai être un moment d’inattention de sa part pour bondir hors de sa portée. Je me retournai, les pieds dans la brume.
Il n’y avait pas de toute possible, avec cette apparence infantile, la même que huit cent ans plus tôt. L’odeur de son corps, cette odeur de mort et de vie à la fois, me mit les larmes aux yeux. A côté, le relent de l’écharpe que je portais constamment semblait bien fade.

-Mao Van-Woodsen…

Je poussai un petit soupir qui se mua en un nuage de fumée qui disparut dans la nuit froide.

-Insaisissable telle le vent…Cela faisait longtemps que je voulais te parler…Huit cent longues années, et finalement, tu es là. Je ne suis pas déçu, tu n’as rien perdu, durant tout ce temps. Tu ne m’as jamais connu, Mao Van-Woodsen, pourtant je n’ai jamais eu d’autre but que de te retrouver depuis que tu m’as…éveillé.
Dans le sang et dans la mort, Mao Van-Woodsen, laisse-moi te dire que tu es la seule femme à avoir été digne de ce que je suis devenu. Vas-tu me tuer, Mao Van-Woodsen ?

Un soupçon de nervosité s'enchaina à une sorte de profonde excitation. Il était rapide et avait de bon reflexe. Il venait de m'échappé. Toutefois, la cause n'était rien d'autre que moi, et uniquement moi. Etait-ce un pervers? Laissant tomber légèrement la tête sur le côté, tout en le dévisageant sans aucune honte apparente. Il connaissait mon nom, ce qui, sur le coup ne m'étonnais pas franchement étant donné que ce devait être un chasseur. Mais ce qui s'en suivit par contre... N'était franchement pas l'un de mes lots quotidiens d'embrouilles divers. Au départ rien de bien inquiétant ne sortait de sa bouche mince. Une discution? Je n'en étais pas encore arrivée à n'être qu'une bête dans l'impossibilité de dialoguer correctement. Enfin, c'est ce que pensais sur le moment. Mais au fur et à mesure de son dialogue étrange. Une suspicion s'installa dans mon petit esprit. Un dégénéré en puissance? Peut être après tout. Ce ne devait pas être le seul. Seulement, le fait qu'il porte au cou l'un des vêtements qui, jadis m'eut appartenu, me perturbais d'avantage.

Eveillé quelqu'un n'est pas bien dure, une claque, ou une souffrance quelconque lui fait prendre conscience que la vie est en réalité une malédiction qui le suivra jusqu'à sa mort. Mais les mots qui s’enchainaient à cela n’étaient pas du même sens que ce que j'en déduisais. Il était bien plus réfléchis et sincères? Que répondre? Prendre fuite? Je n'avais encore jamais vraiment éprouvé un tel chamboulement venant d'un inconnu de la sorte.
Finalement la langue prit partie de ma réflexion. Et plus vite mes mots sortaient au moins je les avais pensés.
"Je te tuerai si tu racontes encore des choses aussi stupides que ce qui tu viens de dire. Je ne t'ai jamais éveillé ne l'étant plus moi même! Alors cesse. "
La voix retentissante, elle n'était plus vraiment sûre de la manière d'agir avec lui. Devait-elle, comme sa première pensée d'action. Lui arracher les yeux et le laisser, agonisant. Ou...

"D'ailleurs, je pourrais savoir à qui ai-je affaire, et non pas l'honneur? J'aime savoir le nom de mes victimes avant de les vider de leurs sang."
Oui, une peste? Bien entendu. Vous ne pensiez tout de même pas que malgré son côté mutin, elle pouvait être mignonne!
Puis, tout en faisant une petit moue de la bouche et le regardant, toujours d'un air un enfantin.
"De plus, il me semble que tu as quelque chose qui m'appartient."

Dommage qu’il est était aussi spécial, car, une jolie bête comme celle-ci était vraiment dommage à gâcher de la sorte. Ou bien pas ? La question n’était plus à l’instant présent. Le chaton allait sortir les griffes. Son âge? sur le moment le détail, n'était pas encore monté au cerveau... Oups.

-Ooh…

J’eus un autre de ces petits sourires propres à faire fuir toute une armée. Pour quelqu’un qui n’était pas éveillée, elle m’avait pourtant l’air bien alerte. Quoi qu’elle m’ait laissé échapper, mais ça, ça arrivait à tout le monde, je n’étais pas exactement une cible aisée.
Mais venant de sa part, je me serais attendu à plus de professionnalisme. Après tout, je savais qu’elle avait au moins huit cent ans. Et sans doute bien plus, à vrai dire. Bien bien plus…

-Eh bien, Mao Van-Woodsen, je serais profondément ravi de voir comment tu escomptes me tuer. Non, vraiment, ça me ferait plaisir, je suis sûr qu’il est mille fois plus intéressant de succomber de ta main…ou de ta bouche…que des cure-dents que ce qui nous sert de contemporains appellent des armes. Tu sais que tu m’as sauvé la vie, d’une certaine façon ? Je suppose que tu n’as jamais eu conscience d’avoir sauvé la vie à qui que ce soit ? Pourtant tu m’as bel et bien éveillé à une forme supérieure d’évolution, Mao Van-Woodsen. Un peu comme toi, je crois. Ni vampire, ni humain.

Je partis d’un grand rire profondément amusé, un rire un peu grinçant qui retentit sur tout le plateau où les sons semblaient résonner. Mao avait vraiment tout pour plaire. A part peut-être une légère agressivité qui ne me seyait guère, mais il conviendrait de discuter de cela plus tard.
Comme de bien entendu, elle ne me reconnaissait pas. Dommage. Mais c’était la continuité naturelle des choses, vu qu’elle, elle ne m’avait rencontré. Elle devait avoir bien d’autres préoccupations le jour où je l’avais vu que de chercher qui l’observait en douce.
L’idée que ce petit bout de femme me vide de mon sang me laissa perplexe. En fait, cela me donnait encore envie de rire. Mais je savais, intellectuellement, qu’il fallait se méfier. Mao était dangereuse.

-Léon~~, nettoyeur~~ de Roncevaux, affirmai-je sans trop prendre le temps de réfléchir. Je fus comte de Roncevaux, avant. Maintenant, je ne suis qu’un vagabond aux yeux des hommes, mais ils ignorent que je suis comme un dieu…

Ce qui n’était que pure affabulation. Je n’avais jamais été comte de quoi que ce soit, d’ailleurs, je doutais fortement que ce trou du cul du monde de Roncevaux soit un comté. Qui est-ce qui se serait intéressé à un endroit pareil ? C’était le genre d’avant-poste où l’on envoyait les sous-off’ que l’on ne voulait pas voir revenir. Entre les pillards des Pyrénées et les Sarazins d’Espagne…

-Quant à me vider de mon sang, Mao Van-Woodsen, sache que tu n’es pas la première à exprimer ce dessein. Pourtant, tous ceux qui en eurent l’idée avant toi sont morts. Oh, je ne doute pas que tu es différente du simulacre de vampire que j’ai occis il y a une ou deux décades, épineuse Mao Van-Woodsen, mais en fait, je maintiens que ce serait un plaisir, il n’empêche que je ne te laisserais pas faire…

Je souris, petit sourire narquois, les doigts serrés, fléchissant doucement les jambes pour être en position et riposter quand viendrait le moment. Je me demandais s’il serait douloureux de se faire sucer le sang. C’était la une question qui méritait bien d’être posée, comme celle sur la capacité des lycans à grimper aux arbres.
Je le saurais peut-être sous peu. Mao semblait désirer récupérer le lambeau de vêtement qu’elle avait abandonné sur un champ de bataille, quelques siècles auparavant. Je la fixai, de mes yeux bleu glace exaltés.

-Alors, Mao Van-Woodsen, viens donc le reprendre !

Je lui envoyai ma francisque. Elle fila en traversant l’air immobile, tournoyante, rapidement suivie par une seconde, qui visait la droite de Mao. Elle était probablement droitière, et aurait donc tendance à esquiver par la droite.
De toute façon, ces petites haches pouvaient bien lui traverser le corps qu’elles ne lui feraient sans doute rien. Je tirai mon cimeterre tout en bondissant vers elle, avalant la distance qui nous séparait à coup de grandes enjambées, pour lui décocher une frappe de la boule piquée de ma Morgenstern.

Je l'observais, n'émettant aucun sentiment qui eut pu éveiller un soupçon. D'ailleurs, avais-je au moins une fois dans ma vie obtenu un sentiment? Oui, j'exagère. Bien qu'il n'est jamais été d'une profondeur remarquable. Mais tout de même! Tout compte en ce bas monde de mortels. Malheureusement pour moi, tous ne semblaient plus l'être. Moi, je suis donc la cause de cette rencontre? C'est ce dont je devais comprendre? Etrange manière de voir les choses. Je ne pensais pas avoir cherché querelle à temps d'hommes sur l'univers. Bien qu'il en soit ainsi, de toute manière, à l'écouter, je n'avais pas franchement de chance de jouer avec lui. Mais qui sait! Les mots ne valent souvent pas les actes. Si? Je hais tout ce qui peut être plus fort que moi. C'est pourquoi, pour le moment, je le hais plus que tout ce que je vois ici. Je l'écoute, sans trop essayer de le suivre dans sa réflexion certainement très intense. Je n'en ai que faire? Peut être légèrement. Mais pas totalement non plus. Quoi? De la difficulté à suivre? Oh, il ne faut pas s'en faire. Son rire, retentissant dans mes oreilles me donne une envie irrésistible de me percer les tympans. Toutefois, faire ce geste ne m'amènerait plus tard que de graves problèmes pour ma petite existence bien tranquille.

Cependant, il serait préférable pour ma petite personne soit d'avantage concentrée sur le petit brun aux yeux bleu que sur moi. Narcissique ? Non… Enfin… peut être un peu, mais rien qu’une lichette. Mon nom, raisonne dans ma tête, avec sa voix de pervers buté. Dois-je le tuer ou simplement fuir pour réfléchir à une autre manière de l’approcher ? Non, fuir serait certainement une honte absolue pour une réputation comme la mienne. Malgré tout… L’idée ne me déplaît franchement pas.

Assez ! Mes yeux alors étrangement vide de toutes présences finissent par se rallumer. Je perçois un sifflement bien trop familier à mon gout. Un gout amer monte dans ma bouche. Comme de vieilles blessures se réveillant inlassablement dans mon être. L’arme vient vers moi, mes reflexes me permettent de l’esquiver, mais bien entendu, loin de penser que mon adversaire soit idiot, je passe aux travers de la deuxième comme un poisson nageant dans des courants d’eau. Elle me frôle, mais je chavire rapidement vers la gauche. J’ai bien eu le temps de corriger les vilains défauts qu’un droitier peut avoir lors d'un combat. D’ailleurs, je suis contente de constater qu’il n’en avait que deux et non trois. Sinon, en plus de souffrir je me serais faites tailler sans trop de remords venant de sa part, je présume. Je pense, ou n’est-ce là qu’une trop grande méfiance de ma part? Faisant la grimace, je dois de nouveau prendre une forme dont je raffole, mais qui ne laisse souvent, pas ma pauvre petite peau sans douleurs passagères. Un, deux, trois. Le voilà en face de moi, mais trop tard pour me frapper. Je suis déjà là haut. Haut dessus de sa tête brune à la regarder avec amusement. Une harpie à prit ma place, elle a gardé mon visage, mais sa couleur étrange varie du gris au bleu terne. Une peau de cadavre, similairement. Il semblerait que ce genre de spécimen dit carnivore ne soit réellement entendu qu’en Transylvanie. Alors, je me demande avec ravissement s’il a déjà vu ce genre de chose ? Je tournoie et fonce à l’assaut des nuages. Mes ailes membraneuses frappent et cassent les airs. Pour que finalement, après quelque seconde à peine, je ne me laisse retomber comme une flèche sur celui qui tente de m’embrocher adroitement. Mes doigts ne sont plus que de sanglantes griffes et mes dents, une mâchoire faite pour mutiler. Etant donné la hauteur, j’arrive sur lui avec une vitesse vertigineuse et le choc, si il y a, pourrait faire disons… Légèrement mal, procurant au concerné quelques morsures ou blessures désagréables.

La boule hérissée de pique de mon arme fendit l’air tandis que Mao bondissait. Elle prit de l’altitude à une vitesse folle, disparaissant rapidement de mon champ de vision en perçant la couche nuageuse qui s’était installée au-dessus de nous.
Cependant, j’avais eu le temps d’apercevoir deux ailes membraneuses et translucides. Les ailes qu’aurait une chauve-souris pelée, une harpie, ou toute autre joyeuseté mythologique. Je poussai un sifflement. Voilà qui promettait d’être plus intéressant que prévu. Je n’avais aucune possibilité de réaliser une chose pareille, mais je n’étais pas sans défenses non plus.
Je passai à ma ceinture la Morgenstern pour prendre mon arbalète dan ma main. L’arme tirait des carreaux à une vitesse avoisinant les trois cent cinquante kilomètres à l’heure, et la furie déchainée que je voyais maintenant fondre vers moi en grossissant avait l’air d’aller assez vite par ailleurs.
Je visai, et tirai. Pris un autre carreau que j’enclenchai à la main, et tirai. Puis encore un autre tir. Et je lâchai mon arme. Les trois carreaux avaient été lancés à une vitesse défiant la logique, tandis que je tirais ma flamberge.
Je fléchis les jambes, tendant la lame vers le haut, bien dans l’axe de mon corps et de Mao. Lame ondulée de deux mètres de long…Qu’elle ne dévie pas, et elle s’embrocherait dessus aussi surement qu’elle me briserait le bras en petits morceaux. Mais qu’elle change de trajectoire, et j’étais prêt à la recevoir de mon cimeterre.
Rien ne comptait à cet instant que de lui ôter la vie. J’étais peut-être collé au sol, mais elle allait comprendre que ça ne m’en rendait pas moins dangereux, et ce pour la simple raison que ce qui la tuait me tuait…et ce qui ne la tuait pas, ne me tuerait pas. Pas un simple choc avec une créature ailée comme je n’en avais jamais vue lancée plus vite que les balles de plomb des fusils.

Les yeux rivés sur la proie de maitre, je ne voyais plus que lui. Il était à moi, et je ne le raterais pas. J'en étais sûre. Et heureusement d'ailleurs, car, alors que mon corps était prêt à lui arracher tous les membres. Une chose étrange vînt me défaire de ma furie passagère. Une douleur vive et sans précédant s'introduisit dans l'une de mes ailes. Je tournais la tête pour remarquer que quelque chose venait de la transpercer à pleine vitesse. Il en fallu de peu pour que les secondes ne me perce comme un rien, elles aussi. Une déviation rapide vers la gauche et les projectiles vinrent se perdre dans le ciel profond. J'avais envie de hurler, non pas de souffrance mais de rage. Une rage folle et déconcertante du fait je m'étais fait avoir, par un chasseur tel que lui. Je continuais cependant ma descente vertigineuse, ne sillant plus d'un centimètre. Une lame étrange vînt alors aveugler les pupilles démoniaques. Dangereuse arme? oui sans doute... Mais l'argent ne m’était nullement mortel. Imbibé d'eau bénite alors? Malheur si c'était le cas.
Etais-je suicidaire? Peut être un peu. Mais, après de si longues années, voir plutôt des siècles. Ma non vie commençait à m'ennuyer, et me sentir véritablement mourir, me paraissais une sorte de nouveau terrain explorable. Quoi? Est-ce si choquant que cela?
Les dents serrées et les bras acérés, je plongeais sur le jeune homme. Du nom de? Mhhh... L'information pour le moment ne me revenait plus. Il m'intriguait autant qu'il m’insupportait...
Je lui agrippais enfin ce qui lui servait de défense, deux bras lamentablement moue. Ou était-ce dû au choc rapide et puissant? Certainement. Mes ailes n'avaient plus la moindre marque de combat, mais une sensation très désagréable vint m'envahir de toutes mes entrailles. La large lame était plongée dans mon corps et les bras de celui -ci devaient être diront nous... Déboités voir en bouillis.

Je tressaillais cependant, et repris rapidement, voir immédiatement, ma forme "humaine". Un sourire ensanglanté vint se nicher sur mon visage. Tendis que je continuais à le fixer de mes yeux d'eau.
"Je pense que ça doit faire mal."

Penser? C'était évident. D’ailleurs, s’il ne lâchait pas bientôt l'épée, j'allais certainement lui enfoncer les yeux dans les orbites. Si elle était bénite ? Et qu’il avait mentis. Alors la douleur interne n’allait plus vraiment tarder à se déclarer. Mais pour le moment, l'expression soudaine que pouvait prendre son visage était bien trop intéressante. Cette scène? Elle devait être tout ce qu'il y a de plus horrifique. La robe alors blanche était immaculé de sang. La pointe de l'épée ressortait du corps mince et des bras étrangement souples allaient bientôt pouvoir être visibles. S'y attendait-il? Je l'ignorais. Vraiment. Tout ce que je pouvais affirmer, c'est que moi même, je n'avais pas préparé ce coup complètement paralysant et... Gerbant? La douleur, peut être la que, sans le savoir, je la cherchais. Vous ne me croyez peut être pas. Mais ne plus souffrir est certes, une chose idylique. Mais pour moi, cela m'amène souvent à une profonde détresse. Je ne sais comment l'expliquer. C'est ainsi.

Tout se passa dans les moindres détails comme je l’escomptais. Mao était gracieusement venue s’empaler sur mon arme, à défaut de mieux, et m’avait réduit le bras gauche en charpie. En fait, la scène s’était déroulée au ralenti. La créature aux ailes diaphanes que j’étais certain d’avoir trouées avait foncé sur la lame en argent. Comme je le lui avais dit, ce n’était que de l’argent. Elle n’en mourrait pas, à moins que la lame reste plantée dans un organe vital ou la décapite. Mais il n’y avait pas la moindre raison pour que cette lame reste là, simplement parce que mon bras était inutilisable, et parce que Mao allait sans doute se débarrasser de ce désagrément.
Alors, quel intérêt d’avoir réalisé un tel acte pseudo-suicidaire ? Simplement, tout hybride qu’elle soit, aussi grande que soit sa puissance, ses blessures ne guériraient pas complètement avant une journée au moins (ou alors je m’étais énormément mépris sur ses capacités), et j’espérais que la souffrance me donne l’avantage qui me manquait pour l’emporter. Parce que bon, je venais qu’un peu de lui arracher les viscères et de lui briser au moins une côte…
Quoi qu’il en soit, sur le coup, la seule pensée qui me vint à l’esprit fut quelque chose comme « putain ça fait mal… ». Effectivement, quand le boulet de canon qu’était devenue la belle Mao me percuta, ma lame traversa son corps comme du beurre et mon bras encaissa tout le choc, mes os parfaitement alignés se compressèrent les uns les autres pour ne laisser qu’une multitude de fragments.
Je poussai un grognement de douleur tandis que mes doigts complètement gourds ne tenaient même plus mon arme. Dans son dos, les ailes de Mao disparaissaient, la laissant telle que je l’avais toujours vue jusque là.
Son regard couleur de pureté se riva au mien, bleu bombardier. L’espace d’un instant. Malgré la grimace de douleur qui marqua mon visage, je gardai mes doigts sur le manche de cuir de la flamberge. Aucune chance de la manier. C’était juste pour la forme. Et un sourire tout ce qu’il y a de plus psychopathe vint cohabiter avec la grimace de douleur.

-Pas autant que toi, j’espère, Mao Van-Woodsen.

Je ne doutais pas qu’elle n’hésitât pas à m’abattre si une ouverture se présentait. L’instant pendant lequel j’avais du faire face à la douleur qui m’avait assailli en aurait été une parfaite si elle n’avait pas été dans le même camp. Pas la peine de réitérer.
Je balançai mon bras droit vers son crâne, bien décidé à la décapiter de mon cimeterre.

Je me mis à sourire à sa réflexion. Un sourire à dents pointues taché de sang. J'étais encore trop loin pour parvenir à lui mordre la chair. Ce qui, sur le moment, me peina légèrement. Gouter à ce sang me démangeait. Il avait eu une vie plus longue que la normale et pourtant n'avait encore, émit aucun signe d'une quelconque transformation. Comble de l'ironie, pour moi, pauvre vampire, qui désirait découvrir le secret. Dans ma tête, la douleur n'était pas si forte que j'aurai pu le penser. Ma blessure trop profonde pour disparaître de la même manière que celle de mon aile, ne se guérirait que sur sa couche extérieure... Dommage. C'était regrettable pour ma petite personne. Dans mon crâne, à cet instant, beaucoup de choses prenaient place. J'étais d'après ses dires, la source de son éveil. Moi qui pensais ne voir en lui qu'un psychopathe... J'étais cependant heureuse de constater que son bras, bien utile d'après ce que je pouvais observer, n'étais plus qu'un morceau flasque de viande endolorie. Lui répondant sur le ton espiègle. Qui, vu la situation, ne convenait pas tout à fait. Son visage, un délicieux mélange, encore inconnu au bataillon. Voilà une nuit qui n'aura pas été veine et inutile.

"Et bien... Je dirais que si tu avais mentis, je pense que ma douleur aurait été plus vive. Là... Je t'avouerai que mon être n'en souffre pas terriblement. J'espère que ça ne te déçois pas trop Léon, Comte d'une bourgade si petite qu'elle en est illisible sur une carte?"

Un léger sourire effronté, et non dissimulé vint s'affichait sur mon visage dit mutin. Je savais, je sentais qu'il n'en resterait pas là. Une envie incompréhensible de me tuer? Mais pourquoi? Moi petite créature stupide et sans défense? Je ne pouvais cependant pas laisser mon pauvre corps meurtrie trop longtemps ouvert à l'air libre. Ceci ne ferait que me fatiguer de part une régénérescence faite en vain. Baissant mon regard figé dans le siens, je me mis à observer doucement ses doigts, qui j'en étais presque persuadée ne devait pas être très bien accrochés. Penchant la tête sur le côté, je me mis à regarder, sans rien faire, la main aux traits saillants du "jeune" homme. Finalement, mon intuition ne m’avait pas trompée. Son bras droit, que j’aperçu d’un vif mouvement du regard, se mit en mouvement. A peine celui-ci parti, j'agrippais le manche de l'arme encore plantée dans mon ventre pour finalement, écrasant certainement un peu plus sa pauvre main, arracher de mon corps la lame tout entière dans un bruit horriblement répugnant. Projetant au plus vite et au plus loin l’objet, dans une sorte de désinvolture à faire peur. Enfin libre, j'empoignais son bras droit, ou celui encore disponible? Comme vous préférez... qui alors allait tout directement vers ma jolie tête brune. Le lui serrant à tel point que la trace de mes doigts pouvaient se dessiner sur sa peau. Je ne comptais pas lâcher l’étreinte. Car, perdre la vie n’était, au final, pas un de mes projets principaux du moment. Levant la tête pour le défier du regard. Je me mis à froncer -sans le savoir vraiment- les sourcilles, montrant ainsi mon désapprouvement total pour ce geste odieusement meurtrié. De mon autre main, dans un geste aussi rapide qu’un léger vent de printemps, je lui exploser le plat de ma main sur la joue gauche. Geste complètement impulsif… Non controlable chez une femme d’après analyse… Mon regard bleu azur toujours plongé dans le siens. Je ne parvenais même plus à trouver que répondre à ce Léon qui, sans pouvoir comprendre comment, parvenait à me mettre dans une rage absolue.

La poigne de Mao sur ma main gauche accrut un peu plus la douleur, mais la variation était suffisamment faible pour que je n’y fasse pas trop attention j’avais déjà très mal comme ça. Et d’un autre côté, cette douleur causée de la main de Mao n’était de fait pas nécessairement désagréable. N’avais-je pas dit que ce serait un plaisir que de mourir de sa main ? Enfin, il fallait tout de même relativiser : mourir n’était pas mon plus grand fantasme, mais mourir de la main de Mao avait déjà quelque chose de plus sulfureux. Quoi qu’il en soit, Mao, avec ses petits bras de jeune fille de un mètre soixante, retira les deux mètres de lame enfoncés dans son corps [Hein Juju…^^] et envoya la flamberge valser loin de là. Mon bras partit en arrière et balla piteusement le long de mon corps. Je le fis bouger de quelques millimètres, mais la douleur m’apprit que ce n’était pas dans la liste de mes possibilités. Il faudrait donc composer avec ce handicap, qui aurait disparu d’ici quelques jours, si j’étais encore là.
J’espérais qu’elle n’ait pas la célérité nécessaire pour bloquer mon coup, cependant, elle l’eut, bien évidemment…Mon bras droit se retrouva pris dans l’étau de sa main, dont il était impossible de soupçonner la puissance sans connaître sa vraie nature. Toujours est-il que nous en étions réduits à un duel de force, et que là, ma carrure largement plus imposante que la sienne ne me servait à rien. Il y avait bien trop de magie en elle pour ça…
En même temps, sa main droite me décocha un simple soufflet, mais je préférais ne pas avoir à vérifier s’il était assez puissant pour me briser les os de la joue ou pas. Je cessai brusquement de pousser sur sa main pour la décapiter, tout en sautant pour lui donner un coup de pied dans les côtes et esquiver à la fois sa gifle monumentale qui passerait selon toute probabilité au niveau où se trouvait ma tête un instant plus tôt.

[tu préfères que je te poussé en te foutant le manche dans le bide pour la virée xD]

J'entendis, sans prendre réellement conscience de la chose sur le moment, des os se craquer de nouveau dans le ventre. Je sentis mon corps se tordre comme une brindille et me mit à grogner de rage. Du sang vint s'accumuler un peu plus sur le bord de mes lèvres. Mon intérieur? Oh... Il avait certainement enduré bien pire, cependant, il ne devait pas être très agréable à observer. Il était vraiment indécent de se faire piétiner de la sorte. Je manquais d'entrainement? Oui, maintenant, je le devinais... Et cela m'agaçais encore d'avantage. Il s'était dégagé de mon étreinte. Et me laissait un instant en paix. Devais-je arrêter ou continuer pour le broyer? En passant ainsi par une expérience identique... La question était, il est vrai, intéressante à analyser. Mais l'instant n'était pas, ou plus? A la réflexion. Mes bras sur les genoux, je n'avais aucunement besoin de reprendre mon souffle. Non, juste besoin que le temps de reconstitution de mes organes internes passent. Handicap très énervant quand l'on sait que notre vie en dépend. Levant les yeux vers le jeune homme. Je ne tenais tout de même pas à perdre la tête tout de suite. Me raclant la gorge pour pouvoir parler sans postillonner de la substance rouge que l'on appelle sang. Je finis par l'entrouvrir toujours avec une délicatesse surprenante dans le ton de la voix.

"J'aimerai tellement te disloquer... Mais tu viens de me mettre l'intérieur en bouilli en moins de temps que je ne le pensais. "

Me relevant finalement, comme une jeune pousse revigorée par la rosée. Et affichant un sourire radieux, je fis mine de me débarrasser de l'hémoglobine encore présent sur les coins raffinés de mes lèvres. Toussotant, et prenant le soin d'observer si un trou était encore visible sur ce qui me servait d'empalement principal. Je fis conquise de remarquer que plus rien n'étais visible extérieurement. Toutefois, à voir ma robe mise en pièce, je n'en fus pas vraiment réjouie. Soufflant d'un ton désespéré, tout en le fixant droit dans les yeux. Je me laissais tomber sur le sol. D'un ton buté et absolument espiègle. En ne le quittant pas du regard. Assise là, telle une enfant boudeuse. Mon comportement, effectué en plein combat était parfaitement accablant et surtout puéril... Comment pouvoir garder un tempérament de la sorte, sachant que je devrais être une vieille grand mère gâteuse... Peut être que les vampires ne vieillissaient pas non plus d'âge mental?

Je sentis avec une certaine satisfaction mes pieds s’enfoncer dans la chaire des côtes de la jeune femme. Rien de casse, bien entendu, mais ça faisait toujours plaisir de sentir qu’un e ses coups portaient. J’eus quand même un pincement au cœur. Un humain normal aurait voltigé et serait retombé KO. Enfin, il est vrai que dans ma position à moi, un humain serait entrain de se tordre de douleur par terre, incapable de faire autre chose que d’attendre de se faire achever. Drôles de créatures que sont les humains…Risibles, à vrai dire.
Je vis du sang perler aux lèvres de Mao. Il était absolument ravissant de regarder ces rubis piqués sur ce fond de satin pâle et délicieux. Je souris, d’un sourire peut-être un peu plus humain cette fois-ci, mais pas trop quand même.
Je haussai les épaules au compliment de la jeune femme. Certes je ne me débrouillais pas trop mal, mais il fallait avouer que j’avais toujours espéré en mon for intérieur la dominer et l’envoyer au tapis en un tournemain. Mais c’était peut-être trop demandé venant d’une femme comme elle. Elle était bien au-dessus de ces nouveaux vampires de cent piges…

-Je te retourne le compliment, je ne me rappelle pas m’être fait dessouder le bras en aussi peu de temps et en autant de morceaux depuis la fois où je me suis fais tirer dessus à la bricole dans Poitiers…

Et Dieu m’était témoin que ça fait mal, un tir de bricole à dix mètres de distance. J’avais dû cesser les hostilités pour aller me soigner, une journée durant, le temps que mes blessures se referment. Le médecin de guerre de mon camp avait ouvert des yeux comme des assiettes quand il m’avait vu. Sa première question avait été « est-ce que vous voulez que je vous achève ? ». Il ne savait pas qu’il était passé à un cheveu de la mort…
Mao se redressa, observa son corps qui semblait n’avoir même pas participé à un combat acharné, et sa robe qui disait clairement le contraire, puis se laissa tomber au sol dans un soupir. Elle me fixa avec un regard espiègle. Je souris du même sourire, sans la quitter des yeux, tandis qu’en même temps, en effectuant le moins de mouvements possibles, je prenais en main mon arbalète qui pendait à ma cuisse en bandoulière, la visais et tirais.